Blogue de conservation

Sur les traces du porc-épic et du pékan au parc national du Bic

15 mars 2016


Dans les années 90, le parc national du Bic était reconnu pour abriter une des plus grandes concentrations de porc-épic en Amérique du Nord. Qu’en est-il aujourd’hui? C’est ce que nous permet de savoir le projet visant le suivi annuel du porc-épic et du pékan, réalisé en période hivernale par des groupes d’étudiants en mammalogie de l’Université du Québec à Rimouski.

Un animal qui a du piquant!

Le porc-épic d’Amérique est un rongeur largement réparti en Amérique du Nord. En hiver, la base de son alimentation est constituée d’écorce d’arbres et d’aiguilles de certains conifères, comme le thuya occidental. Pendant la période hivernale, il voit son domaine vital très réduit en raison de la difficulté des déplacements dans la neige. Aussi, pour limiter ses dépenses énergétiques, il fréquente généralement le même réseau de pistes, rendant ces dernières facilement identifiables.

Figure 1 Pistes de porc-épic dans la neige

Saviez-vous que… Le porc-épic compte plus de 30 000 piquants! Contrairement à la croyance, il ne les lance pas en situation de danger. En réalité, lors d’un contact avec un prédateur, ses piquants se détachent instantanément pour pénétrer dans la chair de l’ennemi. Il peut ainsi en perdre plusieurs centaines qui se renouvelleront en quelques mois…

Une précieuse collaboration

Lors de la création du parc national du Bic en 1984, le porc-épic était omniprésent. Cette abondance de l’espèce fut rapidement identifiée comme un phénomène intéressant pour la recherche et le suivi de la population. En 1988, un premier inventaire fut réalisé par l’équipe de conservation du parc dans le secteur présentant le potentiel le plus élevé, soit celui de la Montagne-à-Michaud. Depuis, on peut compter sur la collaboration de groupes d’étudiants du cours de mammalogie de l’Université du Québec à Rimouski, sous la supervision du biologiste Yves Lemay, pour effectuer ce suivi dans 3 secteurs du parc (en rotation). L’inventaire consiste, après une période de précipitations de neige, à suivre des parcours (transects) répartis à tous les 150 mètres sur le secteur ciblé afin d’y répertorier les pistes et tanières de porcs-épics.

Figure 2 Identification du point de départ d’un parcours (transect) pour la réalisation de l’inventaire

Figure 3 Représentation des portions de parcours (transects) lors de l’inventaire de 2015 dans le secteur de la Citadelle

Les hauts et les bas d’une population

Au début des années 90, on évaluait la densité de la population de porcs-épics dans le secteur de la Montagne-à-Michaud à environ 40 individus/km2. Puis, à partir du début des années 2000, le nombre d’observations a grandement diminué. Les inventaires réalisés ont confirmé un déclin drastique de la population, au point de voir l’espèce presque absente du territoire.

Le nombre d'individus par kilomètre carré était de 39.6 en 1988, 41 en 1991, 38 en 1993, 37.5 en 1995, 18.8 en 1999, 39.7 en 2000, 7 en 2001, 7.2 en 2002, 0 en 2003, 1.2 en 2004, 0 en 2005, 3.7 en 2006, 0 en 2008, 0 en 2009, 0 en 2010, 0 en 2011, 1.5 en 2012, 0 en 2013 et 0 en 2015.Figure 4 Évolution de la densité de porcs-épics au parc national du Bic, tous secteurs confondus, entre 1988 et 2015

Bien que les conditions environnementales puissent expliquer en partie la diminution du nombre de porcs-épics, nous croyons très probable que la présence du pékan, son principal prédateur, ait joué un rôle majeur dans ce déclin. C’est pourquoi depuis 2011, le projet réalisé par les étudiants de l’UQAR intègre un suivi des pistes de pékans.

Qu’en est-il maintenant?

L'inventaire réalisé à l’hiver 2015 dans le secteur de la Citadelle a confirmé la poursuite du déclin de la population de porcs-épics, puisqu'aucun signe de présence n'a été relevé. Également, on a observé une diminution de l’indice d’abondance chez le pékan.

Figure 5 Pékan

Le nombre de pistes par kilomètre-jour était de 0.63 en 2011, 0.49 en 2012, 0.42 en 2013 et 0.19 en 2015.

Figure 6 Estimation de l’abondance (pistes/km-jour) du pékan dans le parc national du Bic, tous secteurs confondus, entre 2011 et 2015

La réalisation à long terme de ce suivi est précieuse pour documenter l’évolution des interrelations d’abondance entre ces 2 espèces. Est-ce que cette diminution chez le pékan se traduira par le retour progressif du porc-épic?

Références

Arsenault. A et F. Villeneuve 2015. Estimation de la densité de population du porc-épic (Erethizon dorsata) et indice d’abondance du pékan (Martes pennanti) dans le parc national du Bic (Secteur de la Citadelle) au moyen d'une méthode d'inventaire par transect. Université du Québec à Rimouski. 14 p.


Marlène Dionne est responsable du service de la conservation et de l’éducation au parc national du Bic. dionne.marlene@sepaq.com

Yves Lemay est auxiliaire d’enseignement et de recherche en biologie à l’Université du Québec à Rimouski.

Photos: Daniel Vignola, Josée-Anne Otis, Fur Institute of Canada, Marlène Dionne et Joaquim Garcia.


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