Blogue de conservation

La protection du béluga du Saint-Laurent, c’est l’affaire de tous

21 août 2012


Cette petite baleine blanche qui se retrouve normalement dans les eaux froides de l’Arctique réside pourtant à l’année dans les eaux du parc marin. C’est une population isolée de celle de l’Arctique et elle se retrouve ici à la limite sud de sa distribution. Autrefois très abondante dans le Saint-Laurent et le fjord du Saguenay, cette population est aujourd’hui désignée « menacée » au Québec. Jadis estimée entre 7 800 et 10 100 individus, la population se maintient aujourd’hui à 1 100. La principale cause du déclin de la population est sans contredit la chasse aux bélugas qui fut pratiquée jusqu’en 1979.

Stable… mais aucun signe de rétablissement!

Un programme de suivi de la population est réalisé par Pêches et Océans Canada. Les données récoltées à ce jour permettent de constater que la population est stable depuis plus de 20 ans. Des relevés aériens combinés à un programme de récupération des carcasses constituent les outils de base de ce suivi. Les indices d’abondance proviennent de relevés aériens photographiques : le nombre de bélugas observés en surface est multiplié par un facteur de correction standardisé pour compenser les animaux en plongée et invisibles lors des relevés aériens. Le programme de récupération des carcasses de bélugas permet quant à lui de déterminer le sexe et l’âge des individus en plus de déterminer les causes de mortalité des bélugas échoués. Les maladies infectieuses et les tumeurs cancéreuses sont les principales causes de mortalité chez les 389 carcasses récupérées jusqu’en 2009 (réf. : Suivi de l’état du Saint-Laurent).

Une population menacée

Les renseignements recueillis par le suivi des carcasses permettent de mieux cerner les principales menaces qui planent sur le béluga du Saint-Laurent et de comprendre pourquoi la population ne montre aucun signe de rétablissement. Le programme de rétablissement du béluga vise justement à préciser ces menaces afin de proposer des actions concrètes.

Les principales menaces au rétablissement de la population sont :

  • Les contaminants;
  • Le dérangement par les humains : sur l’eau et par le bruit;
  • La diminution des ressources alimentaires;
  • La dégradation de l’habitat.

L’absence de rétablissement est probablement due à un ensemble de facteurs agissant sur la santé de la population. Cette population se retrouve dans un écosystème fortement pollué situé au sein d’une voie navigable commerciale très fréquentée.

Carcasse de Béluga récupérée dans le secteur de Rivière-du-loup en 2008.

Mesures de protection à l’échelle du parc marin

La protection des bélugas dépasse largement les frontières du parc marin. Cependant, sur 1245 km2 d’aire protégée, plusieurs actions peuvent être mises en œuvre pour y contribuer. La protection du béluga est à la base de la création du parc marin. Le territoire ainsi protégé couvre une partie de l’écosystème où le béluga passe toute sa vie. Par la mission qui lui est dévolue, le parc favorise les activités de recherche et de protection du béluga. Les cogestionnaires du parc marin, Parcs Canada et Parcs Québec, travaillent ensemble pour réaliser cette mission.

Le règlement

Pour minimiser le dérangement des mammifères marins, le règlement sur les activités en mer vise notamment à limiter les distances d’approche, la vitesse de déplacement et le temps d’observation. Une disposition spéciale pour les bélugas et les baleines bleues, deux espèces en péril, précise que la distance d’approche pour ces deux espèces est de 400 m, contrairement à 200 m pour les autres mammifères marins. Le règlement est le même pour tous les types d’embarcation : kayak, pneumatique, bateau à moteur, voilier… La bulle de 400 m fut déterminée par des travaux de recherche sur le dérangement qui démontre qu’au-delà de cette distance les bélugas ne modifient pas leur comportement et continuent leurs activités vitales.

Le zonage

Le zonage du parc marin est le premier au Canada à être réalisé en milieu marin et est graduellement mis en place. Celui-ci prévoit notamment que 3 % du territoire sera en zone de préservation intégrale, ce qui signifie qu’on ne pourra y avoir accès. Ces zones sont en partie déterminées par leur valeur écologique au maintien d’espèces menacées comme le béluga. Par exemple, la baie Sainte-Marguerite est reconnue comme l’un des habitats important du béluga. Ce lieu serait sans doute un lieu d’élevage des jeunes. Pour ces raisons, il est important d’accorder un statut de protection particulier à cette baie afin de garantir un habitat adéquat aux bélugas.

La conservation, c’est l’affaire de tous

Le dérangement est l’une des menaces pour laquelle la collaboration de tous les visiteurs peut faire la différence et pour laquelle chaque geste compte. Pour prendre les bonnes décisions sur l’eau, le visiteur doit être informé des particularités concernant la navigation dans une aire marine protégée. Différents moyens sont déployés pour informer les visiteurs de l’existence d’un règlement. Le Guide du plaisancier présente le règlement et invite les gens à se soumettre à un code d’éthique en navigant sur le parc marin. La tournée des marinas permet de rencontrer les plaisanciers directement. Des panneaux de signalisation sont installés aux accès à l’eau et présentent le territoire du parc marin, le règlement et le zonage. En 2011, dix patrouilles de prévention et de sensibilisation en mer ont été effectuées et ont permis d’intercepter environ 80 embarcations de tous types pour informer les visiteurs. Ces différentes actions visent à décourager les visiteurs à s’approcher volontairement des bélugas et à respecter la bulle de protection de ceux-ci.

Les bélugas ont un potentiel attrayant extraordinaire avec leur comportement curieux et leur mine sympathique. Ils ont soulevé les passions lorsque leur déclin est devenu évident et le béluga est alors devenu un emblème de l’état de santé du Saint-Laurent. La survie de cette population est l’affaire de tous. Les mammifères marins sont des géants bien fragiles!


Nathaël Bergeron, codirectrice du parc marin du Saguenay–Saint-Laurent, bergeron.nathael@sepaq.com.

Photos : Jean-Louis Provencher (Parcs Canada) et Mathieu Dupuis.


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