Valérie Bégin et ses mammifères marins

Chat, chien, lapin, tortue, poisson, perroquet, lézard… difficile de trouver un animal que Valérie n’a pas eu! Même si elle a développé des allergies à certains d’entre eux, il n’était pas question qu’elle laisse filer son rêve d’en faire une carrière.

Ses débuts à l’Aquarium

Après ses études en sciences de la nature au cégep Garneau, elle choisit l’Université de Sherbrooke pour parfaire ses connaissances en biologie. Le régime coopératif lui permet alors de faire des stages auprès des mammifères marins à l’Aquarium du Québec et à l’Institut Maurice-Lamontagne.

Dans sa jeune vingtaine, elle décroche un emploi à l’ancien Aquarium du Québec, juste avant sa fermeture pour une cure de rajeunissement. Elle revient y travailler deux ans plus tard, en 2002, lors de sa réouverture sous le nom de Parc Aquarium du Québec.

« C’était excitant de préparer la réouverture, avec le site extérieur bonifié et le réaménagement du bassin des phoques de la zone arctique », se remémore Valérie. Elle entamait à ce moment-là son nouveau défi comme naturaliste, partageant avec le public ses connaissances sur le merveilleux monde marin.

Rapidement, on lui propose de faire le saut en joignant les mammifères marins. Elle est aux oiseaux! « Je regardais avec envie mes collègues qui travaillaient avec les ours et les phoques. J’ai tout appris avec l’équipe d’expérience qui était en poste. Tout s’est fait naturellement, je n’ai jamais eu peur de travailler avec des animaux plus impressionnants », raconte-t-elle.

Les morses, ses « petits » préférés!

C’est en 2003 que l’Aquarium accueille un premier morse, Arnaliaq. Valérie garde un souvenir impérissable de ses premiers contacts avec le colosse moustachu.

« Personne dans l’équipe n’avait encore travaillé avec des morses. Il a fallu tout apprendre de cet animal social qui peut parfois être dangereux », souligne-t-elle. En effet, un morse adulte peut peser plus de 1 800 kilos!

Avec le temps, Valérie développe une relation de proximité avec ses protégés : « Puisque ce sont des animaux sociaux, c’est beaucoup plus facile d’entrer en contact avec eux. Ils ont une capacité d’apprentissage incroyable. »

Une tonne d’amour pour Boris et Balzak

À l’arrivée de Boris en 2005, elle a déjà un bon bagage de connaissances. Les entraînements avec ce morse du Pacifique sont stimulants et formateurs. Dès les premiers instants, un fort lien de confiance se développe.

Elle n’est pas la seule à tomber sous son charme. Grâce à ses célèbres vocalises, Boris est devenu la vedette de l’Aquarium. Il possède tout un répertoire, allant du sifflement au bruit de train, en passant par des sons caverneux et des becs bien sentis.

Le même lien privilégié se crée entre Valérie et le fils de Boris, Balzak, né à l’Aquarium en 2016. Parmi les guides animaliers, elle est l’une des responsables qui s’en occupent chaque jour. « Je sais que Boris et Balzak me font pleinement confiance, exprime-t-elle. Ils savent que je ne leur ferais jamais de mal. »

Elle garde tout de même en tête que ce qui les attire le plus, c’est la nourriture. Les changements hormonaux peuvent aussi affecter leurs interactions. « Lorsque Boris est en période de reproduction, je ne peux pas lutter contre les hormones, je dois m’adapter et l’accepter comme il est », décrit-elle.

Avec Boris, notre spécialiste des morses utilise sa douce voix pour obtenir sa coopération. Il la reconnaîtrait entre mille, ou presque! Lorsque la sœur de Valérie est venue visiter l’Aquarium et qu’elle a prononcé son nom dans l’assistance, il est allé directement la voir.

L’affection débordante de Junior

L’autre pensionnaire de l’Aquarium pour qui Valérie a un faible, c’est Junior, l’ara logeant au-dessus du bassin des raies. Il trépigne quand il l’aperçoit. « Il me rappelle le perroquet que j’ai eu à la maison pendant plusieurs années. Ce sont des animaux très intelligents et attachants », avoue-t-elle.

Aujourd’hui, elle supervise les aquaristes qui lui prodiguent des soins. Elle leur donne des conseils, que ce soit pour son bain, un examen physique, le limage de ses griffes ou l’entretien de son bec, le tout en évitant les morsures. Eh oui, malgré son charme légendaire et ses amusantes jacasseries, Junior exprime parfois son insatisfaction en mordant à pleines dents, ou plutôt à grands coups de bec!

Le décès d’Eddy

Au cours des 20 dernières années, Valérie a dû composer avec le décès de certains de ses protégés. « C’est normal de s’attacher, puisqu’on passe plus de temps avec eux qu’avec nos propres animaux à la maison. Si c’est un animal dont je suis responsable, le lien est encore plus fort et la peine plus grande. Ça m’est arrivé de pleurer », admet-elle.

De son propre aveu, le départ d’Eddy l’a beaucoup touchée. L’ours blanc, figure emblématique de l’Aquarium, est mort à l’âge de 21 ans en raison de troubles rénaux.

« Chaque fois qu’un animal meurt à l’Aquarium, nous accrochons un cadre dans le local des employés avec des photos de lui. Ça me touche et ça m’aide à faire mon deuil. Je me dis que je dois continuer à être présente pour les autres animaux », explique-t-elle.

Un travail physique

Le métier de guide animalier ou guide animalière aux mammifères marins est exigeant physiquement. Valérie et ses collègues doivent transporter des chaudières de nourriture contenant jusqu’à neuf kilos d’aliments. Beau temps, mauvais temps, ils doivent donner les soins appropriés aux ours, aux renards, aux phoques, aux morses et aux oiseaux de proie. En hiver, c’est eux aussi qui doivent pelleter les enclos.

Parmi les qualités requises pour cet emploi, outre un intérêt marqué pour les animaux, Valérie estime qu’il faut apprécier le grand air et ne pas être dédaigneux. Ramasser les excréments et couper des rats et des souris pour nourrir les pensionnaires, ça fait partie de leur quotidien. Cœurs sensibles s’abstenir!

Carburer aux défis

Valérie adore relever de nouveaux défis, et on peut dire qu’ils sont nombreux! Par exemple, avec les entraînements biomédicaux, le personnel prépare les animaux à recevoir certains soins précis (prises de sang, radiographies, etc.) de façon volontaire. Les récompenses sont essentielles pour nos vedettes poilues!

« Bientôt, les phoques se feront vacciner. Ils doivent tolérer d’être piqués, un peu comme nous. Les entraîner est vraiment motivant! Parfois, les animaux sont moins réceptifs parce qu’ils n’ont pas faim, il faut être patient et respecter leur rythme. C’est très gratifiant lorsqu’on arrive à administrer un vaccin ou à faire une échographie avec la coopération d’un animal, sans avoir à l’anesthésier. C’est beaucoup moins stressant pour lui et, surtout, plus sécuritaire », affirme-t-elle.

Nouvellement chef d’équipe, Valérie a bien l’intention de demeurer encore longtemps à l’Aquarium. Ses yeux brillants et son sourire éclatant en disent beaucoup sur le bonheur qu’elle éprouve auprès de ses chéris. La voir interagir avec les morses, les renards arctiques et les phoques est un spectacle en soit.